mardi 1 juin 2010

Des tuteurs pairs transmetteurs de savoirs ?


Des tuteurs transmetteurs de savoirs ?

La réponse à cette question est à chercher dans les propos d’Aminata, lorsque nous lui avons demandé de s’exprimer sur son activité tutorale. Voici un extrait de ses déclarations :

« Comme Sharmini a des difficultés et que la maîtresse ne peut pas toujours être là, je l’aide [...]. Quand elle ne comprend pas, je lui donne des exemples. Je lui donne un premier exemple, puis un second, j’essaie de lui montrer comment il faut faire et après elle comprend [...]. J’aime bien aider, quand je comprends quelque chose, je l’explique aux autres pour qu’ils puissent faire le travail, pour qu’ils comprennent. »

Donner des exemples, montrer, expliquer, pour que le tutoré puisse comprendre ce qu’il apprend ; telles sont les principales procédures d’aide évoquées par cette tutrice. D’un côté, l’enseignante propose des situations pédagogiques à même de favoriser l’acquisition de savoirs spécifiques (ici des notions géométriques) ; de l’autre, Sharmini essaie de les résoudre non sans mal. C’est cette sensibilité aux difficultés rencontrées par le tutoré qui rend pertinente l’action du tuteur ; ce que Moust (1993) appelle la congruence cognitive. Parce qu’Aminata sait détecter ces difficultés (pour les avoir elle-même vécues), elle peut intervenir de manière adaptée. Dans ces conditions, on ne peut pas dire que le tuteur transmette véritablement des savoirs, il permet plutôt leur transmission. Il joue un rôle d’interface entre le maître et l’élève, entre les attentes du premier et ce que peut faire le second ; rôle essentiel en situation interculturelle où les problèmes de communication, d’échanges, sont accrus.

À la différence des moniteurs, on ne peut donc pas dire que les tuteurs dispensent un quelconque enseignement ou contrôlent quoi que ce soit. Ce sont plutôt des auxiliaires pédagogiques qui, lorsqu’ils arrivent à percevoir les besoins des tutorés primo-arrivants, adoptent une position de médiateurs socioculturels. Prêts à aider, à conseiller, à reformuler les propos des maîtres, le cas échéant à réexpliquer ; ils facilitent la tâche de ces mêmes tutorés. Il faut néanmoins savoir que n’est pas « passeur interculturel » qui veut. Dans cette affaire, l’expérience du passage paraît déterminante ; à condition qu’elle n’ait pas été trop altérée par l’usure du temps.

Alain BAUDRIT

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